Revenons un peu sur la genèse des USC et de l’organisation en général de la Fédération liégeoise du PS.
Faut-il le rappeler, le POB (Parti Ouvrier Belge), ancêtre du PS, est né en 1885 de la fusion de plusieurs associations ouvrières. On entend par associations ouvrières aussi bien des organisations politiques que syndicales, mutualités et coopératives. Les organisations syndicales étaient d’ailleurs majoritaires dans la constitution du POB et le resterons pendant un certain temps. Jusqu’avant la Deuxième Guerre mondiale où les quatre branches de l’Action commune Socialiste ont pris leur indépendance, on s’affiliait au POB soit via un des groupes politiques locaux membres du POB, soit via une des organisations syndicales, mutualités ou coopératives de la région membres du POB. Cela n’empêchait pas d’être membre de chacune de ces organisations ou certaines d’entre elles d’être actives sur plusieurs de ces plans.
A noter également que les Wallons¸ bien qu’ils représentaient déjà l’essentiel du prolétariat et qu’ils aient été proportionnellement nombreux au sein de la Première Internationale/Association internationale des travailleurs (1864-1872), étaient au départ minoritaires au POB par rapport aux Flamands et aux Bruxellois, mais cette situation va très vite s’inverser. A Liège, une seule association ouvrière participa au congrès constitutif du POB, l’Union Démocratique, groupe politique né d’un rassemblement de socialistes et de libéraux de gauche. Cette dernière devint logiquement la section liégeoise du parti pour l’arrondissement.
En 1891, les diverses sociétés socialistes de la région liégeoise se réunirent enfin sous l’égide du POB pour en former la Fédération liégeoise. Les premiers statuts de la Fédération liégeoise donnaient encore beaucoup d’autonomie aux groupes qui la composaient dans leur organisation interne mais tous devaient évidement respecter le programme et les statuts du POB. Néanmoins, les traits de l’organisation actuelle de la Fédération liégeoise se dessinent déjà avec une Assemblée générale au sein de laquelle sont choisis les membres du Comité fédéral, comité qui est chargé à la fois de maintenir de bonnes relations entre les sociétés affiliées et de créer de nouveaux groupes dans les communes où le Parti n’en compte pas encore, sans oublier de faire respecter les décisions du Parti. En 1894, est créé le Secrétariat permanent, suivi en 1904 par l’exécutif supérieur restreint qu’est le Bureau fédéral. Le Secrétaire permanent est élu par l’Assemblée générale de la Fédération parmi les candidats présentés par les différents groupes locaux.
Quant au mode de financement de la Fédération et des groupes locaux, il reposait évidemment essentiellement sur les cotisations payées par les affiliés, ce à quoi s’ajoutaient des opérations de souscription lancées en période électorale en particulier. Ces ressources s’avérant vite insuffisantes, l’idée est née dès avant 1900 de demander aux mandataires de reverser à la Fédération une partie du revenu de leur mandat. La Fédération sera néanmoins parfois contrainte de recourir à des emprunts pour équilibrer ses finances, surtout au début lorsque la Fédération ne comptait encore que peu de mandataires. Les groupes locaux seront aussi aidés financièrement pour la propagande par les coopératives qui y consacreront une partie de leurs bénéfices.
Le modèle de base sur lequel va plus précisément se développer le POB au niveau politique locale est celui des ligues ouvrières, ligues socialistes, ligues électorales et cercles de propagande. Certaines de ces organisations étaient mises en place pour les élections et disparaissaient aussitôt après ou ne duraient que quelques années puis réapparaissaient. Si la plupart correspondaient au territoire d’une commune, voire d’un quartier à Liège, d’autres avaient un champ d’action étendu à plusieurs communes, comme la Ligue socialiste de l’Ouest, active sur Ans et Glain, ou le Cercle national de propagande du canton de Fexhe. Certaines s’adressaient à un public très précis, comme le groupe socialiste flamand à Liège, le Deutscher Arbeiterverein Luttïch Umgegend, ou au contraire plus étendu, comme l’Union des socialistes-chrétiens à Flémalle-Grande.
Chaque ligue était administrée par un Comité de neuf membres dont deux secrétaires, un trésorier et un bibliothécaire, tous élus pour un an par une Assemblée générale. Le Président du Comité change à chaque séance. La ligue choisissait les délégués qui la représenteraient à l’Assemblée générale de la Fédération liégeoise. Outre le choix de ses candidats aux élections, les activités de la ligue résidaient notamment dans l’organisation de conférences et de meetings. En théorie, quand il existait plusieurs associations ouvrières affiliées au sein d’une même commune, il était prévu la création d’une Fédération locale avec trois délégués par association mais une seule voix par association au sein de celle-ci. La Fédération locale se réunissait une fois par semaine. Les membres de son Bureau exécutif étaient élus pour six mois et le Président changeait de nouveau à chaque séance. Se greffaient à l’organisation locale comme aujourd’hui une Fédération cantonale, administrée par un Comité d’au minimum cinq membres et chargée en particulier de la préparation des élections provinciales. A noter encore l’existence au niveau provincial d’un Congrès et d’un Comité, ce dernier étant composé d’au moins deux (au moins un aujourd’hui) délégués par Fédération d’arrondissement.
Les majorités socialistes communales se multipliant dans l’arrondissement, la Fédération liégeoise du POB estima nécessaire de parfaire l’organisation de la vie politique locale en supprimant le modèle des ligues, cercles de propagande et Fédération locales pour le remplacer à partir de 1919 par le modèle des Unions Socialistes Communales (USC), un modèle qui s’étendra par la suite à tout le parti.
En 1923, sur les 115 communes de l’arrondissement de Liège, on dénombrait 94 USC. Après la fusion des communes dans les années 70, des sections furent maintenues au sein des anciennes communes et constituent donc désormais des subdivisions des USC, la tendance générale étant toutefois ces derniers temps à la suppression des sections. Pour rappel, il existe à Liège-ville, en plus des sections, une subdivision de l’USC entre différentes ligues correspondant aux différents quartiers de la ville, lointain souvenir des ligues ouvrières, ce qui n’est le cas dans aucune autre ville de Wallonie.
Avec 20.000 affiliés environ, la Fédération liégeoise du PS est actuellement – et de loin – la plus grosse fédération. Elle l’a d’ailleurs toujours été ou presque, et ce dès 1920. Il est cependant regrettable de constater que depuis plusieurs années, le nombre d’affiliés, un peu comme partout, ne cesse de diminuer.
Guillaume Rimbaud – ALPHAS
Sources principales :
- Linda Musin, 1885-1985 : Histoire des Fédérations : Liège, coll. Mémoire ouvrière, éd. PAC, Bruxelles, 1985 (Coll. ILHS)
- Emile Vandervelde, Le Parti Ouvrier Belge 1885-1925, éd. L’Eglantine, Bruxelles, 1925 (Coll. ILHS)
- Louis Bertrand, Le Parti Ouvrier Belge et son programme, Bruxelles, 2ème éd., 1886 (http://bsstock.files.wordpress.com/2008/03/bertrand-lepartiouvrierbelge1886.pdf)
- 1885-1985 : du Parti Ouvrier Belge au parti Socialiste, éd. Labor, Institut Emile Vandervelde, Bruxelles, 1985 (Coll. ILHS)
- Revue Socialisme, n° 188 (mars-avril 1985) (Coll. ILHS)
- Fonds d’archives de la Fédération liégeoise du POB/PSB/PS (Rapports des Congrès du POB/PSB/PS et Rapports d’activités de la Fédération liégeoise du POB/PSB/PS) (Coll. ILHS).
Post-scriptum : Je profite de l’occasion pour informer les USC/Sections et les militants qu’ALPHAS, en tant que centre d’archives lié à la Fédération liégeoise du PS, est à votre disposition pour tout don ou dépôt d’archives (la convention de dépôt vous permet de déposer des documents tout en en restant propriétaires). Par ailleurs, nous souhaiterions pouvoir recevoir régulièrement les éventuels périodiques des différentes USC et sections. Nous serions par ailleurs désireux d’interviewer les militants (en particulier les mandataires communaux, qu’ils soient bourgmestres, échevins ou conseillers communaux).
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